Le PLU d’Orsay est approuvé depuis peu, il est opposable aujourd’hui. Il présente des aspects très volontaristes notamment en termes d’écologie urbaine, de maintien et de préservation de la biodiversité, de sauvegarde et valorisation du patrimoine bâti et des paysages. Pouvez-vous nous rappeler les fondements de cette volonté de la Ville ?

 Cette démarche s’inscrit dans une double préoccupation. D’abord, être une ville de son temps et qui sache profiter de ses atouts. Orsay est sous la pression de son attractivité dans un environnement relativement exceptionnel en vallée de Chevreuse. La ville a déjà connu d’importants « bouleversements » avec la création de la faculté des Sciences d’Orsay en 1955, la création des Ulis, la réalisation de la RN118 et de la ZA[2] de Courtaboeuf dans les années 1970. Orsay a toujours su conserver un environnement de qualité et une identité forte. Aujourd’hui, avec le projet Paris-Saclay, les choses s’accélèrent avec donc de l’enthousiasme, mais aussi un peu de méfiance et la nécessité pour la Ville de poursuivre le « contrôle » de ce qui fait la qualité du cadre de vie, au bénéfice de l’ensemble des habitants. Ensuite, cette volonté s’inscrit dans une orientation politique affirmée de privilégier les dispositions du PLU visant non seulement à protéger mai aussi à promouvoir cet environnement. En ce sens, CODRA nous a bien accompagné en ayant très vite compris ce qu’était notre ville et ce qu’on recherchait. Ça n’est pas neutre dans l’ambition et ses concrétisations.

L54_itw_orsayComment cette ambition et les traductions réglementaires ont été perçues puis vécues par la population orcéenne lors des moments de concertation et de l’enquête publique ? Quelles ont été les causes de satisfaction et de mécontentement ?

 L’écriture du PADD[3] a permis de dégager des objectifs généraux avec lesquels tout le monde était d’accord : protéger l’environnement, préserver le patrimoine, garantir un paysage de qualité… Nous aurions sûrement dû renforcer la communication à cette étape, mais rien n’indiquait alors qu’on ait à le faire.

Ensuite, la bataille n’a pas été simple. Jusqu’à présent, la ville d’Orsay n’avait pas vraiment les moyens d’intervenir par le biais de son PLU, en cas d’atteinte à l’environnement, au patrimoine ou aux paysages. Les mesures réglementaires ont été diversement perçues : reconnaissance et même fierté de voir sa demeure inscrite sur la liste du patrimoine protégé pour certains ; ou au contraire des atteintes intolérables aux projets individuels pour d’autres.

C’est à ce stade que l’élaboration d’un PLU devient passionnante car on est plongé au cœur d’un débat entre intérêts particuliers et intérêt général. C’est une vision politique qui permet d’éviter le pari à court terme de certains requérants pour repositionner l’intérêt général au cœur du projet.  Il ne faut pas demander l’impossible – tout le monde ne peut être d’accord ! Il faut être convaincu et l’équipe technique de la ville d’Orsay qui a piloté et suivi la révision du PLU nous y a beaucoup aidé. 

Le PLU est aussi exigeant quant aux possibilités de construire à proximité de la RN 118, compte tenu des nuisances liées à cet axe. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce principe de précaution ?

 La RN118 est un axe qui a beaucoup impacté la ville d’Orsay lors de sa réalisation, mais cette route a été aussi un atout de développement considérable pour tout le monde, nous faisant passer de la campagne à la ville. Puis le temps a passé et l’on s’est mis à s’inquiéter de la pollution atmosphérique et des nuisances sonores. Chacun sait que cela porte atteinte à la santé. Nous avons donc décidé d’agir à travers la révision du PLU en interdisant la mono-orientation des logements en direction de la RN118, dans un périmètre de 200 mètres. Il s’agit d’une mesure modeste mais qui permet déjà d’aller vers un urbanisme plus favorable à la santé.

Une partie du territoire d’Orsay est comprise dans le périmètre de l’OIN[4] Paris-Saclay avec le projet de Campus Urbain notamment. La révision du PLU porte obligatoirement sur l’intégralité de la commune. Est-on dépossédé d’une partie de la réflexion pour le PLU lorsqu’une OIN prend place sur une grande partie du territoire ?

 Oui, c’est une dépossession. Est-ce que cela à un sens ? Oui, pour les projets véritablement d’intérêt public national. La notion n’est pas à contester… l’intérêt de la nation va au-delà de l’intérêt local !

Le principe du Campus Urbain consiste à concentrer des équipements scientifiques, de recherche et d’enseignement sur un même site pour en faire un « étendard ». Le principe est peut-être daté, à l’ère du numérique. Si le projet fait ville, alors oui ce sera intéressant… mais la ville ne se décrète pas !

En tout cas, ce sera indéniablement un atout pour Orsay. Nous avons tout intérêt à intégrer notre vision de notre territoire avec notamment des nécessaires liaisons nord-sud, comme le téléphérique entre la vallée et le plateau et même idéalement aussi avec les Ulis et la ZA de Courtabœuf… Aujourd’hui les conditions n’y sont pas !

 La révision d’un PLU est une démarche assez longue, deux ans dans le cas d’Orsay. Vous vous êtes largement impliqué techniquement mais aussi en conduisant des « négociations internes » pour que les autres élus puissent comprendre, s’approprier et porter le PLU.

 La démocratie locale fonctionne bien. Les élus sont à l’image de la population. L’essentiel des élus étaient très contents de porter collectivement un PLU ambitieux et courageux sur l’environnement, sur le patrimoine, sur la préservation des paysages. Ils sont aussi des résidents orcéens avec les mêmes préoccupations, enthousiasmes et inquiétudes que les autres citoyens. Le débat est donc complexe. L’appel de l’intérêt général pour dépasser son cadre personnel a prévalu. Le maire a aussi joué pleinement son rôle en prenant du recul, en écoutant les avis divergents, en tenant compte des revendications de la population. Au final, il a recalibré certaines choses mais il a surtout porté le sujet, conscient que le contenu du dossier répondait à une véritable attente de la population orcéenne.

In fine, cette expérience de la révision de notre PLU montre qu’un document d’urbanisme local dépasse les clivages politiques. Finalement, les différents groupes ont porté l’élaboration du PLU soit directement, soit en évitant de s’y opposer fermement.

 Quels sont pour vous les éléments déterminants pour réaliser un PLU ?

 Il faut trouver l’identité de sa ville et construire autour ! En ce sens, réviser le PLU d’Orsay était « facile » car l’identité est forte ici. D’une façon générale, il ne faut pas chercher à faire l’unanimité. Faire plaisir à tout le monde… ça ne marche pas !

 

Propos recueillis par David Lizion

 

 

[1] Plan Local d’Urbanisme
[2] Zone d’activités
[3] Projet d’Aménagement et de Développement Durables
[4] Opération d’intérêt national