Les autorités marocaines ont organisé un Atelier Métropolitain à Casablanca en janvier 2017, afin de dialoguer sur le projet de ce territoire à l’horizon 2030 et de s’inspirer de bonnes pratiques internationales. Nous avons participé à cette rencontre, dans le cadre d’une mission conduite par l’OCDE [1], occasion unique et passionnante de prendre part aux prémices d’un projet métropolitain.

Un territoire en mutation

Avec ses 4,3 millions d’habitants sur une surface de 1 615 km², le Grand Casablanca est la première agglomération du Maroc. Au cours des cinquante dernières années, elle a connu une urbanisation accélérée et un développement économique soutenu. Ce processus s’est également caractérisé par plusieurs difficultés : étalement urbain, développement de l’habitat informel, intensification de l’usage de la voiture individuelle, généralisation des taxis, forte pollution…

Aujourd’hui, Casablanca nécessite une réponse à la hauteur de ces défis, afin de garantir une meilleure qualité de vie pour les habitants et de se positionner en tant que pôle économique au niveau international. Cette réponse doit être formalisée à travers un projet métropolitain intégré, vertueux et à la bonne échelle.

Une structure métropolitaine à mettre en place, mais sur quel périmètre ?

L’étape préalable à la mise en place d’une nouvelle gouvernance consiste à définir le périmètre du territoire métropolitain. L’OCDE recommande qu’il corresponde à l’« aire fonctionnelle », c’est-à-dire au bassin de vie et d’emploi d’une grande partie des habitants. Celle-ci se détermine à partir de la mobilité quotidienne des habitants. En l’absence de données de déplacements, comme c’est le cas pour Casablanca, le périmètre se détermine de manière théorique, à partir des temps de parcours entre les communes et le centre urbain.

A partir de 2015, la région du Grand Casablanca, dépassée par le développement urbain, a laissé place à celle de Casablanca-Settat, englobant l’aire fonctionnelle et les territoires ruraux aux alentours, ne correspondant pas non plus au territoire métropolitain. Comment bâtir une structure de gouvernance à cette échelle ? Les évolutions récentes apportent des éléments de réponse. En effet, la loi relative aux communes de 2015 a instauré l’intercommunalité au Maroc. La commune de Casablanca et plusieurs autres communes ont décidé de s’en saisir pour créer l’Etablissement de Coopération Intercommunale Al Beida, chargé d’organiser la mobilité. Cet établissement préfigure une future instance métropolitaine, intégrant plusieurs compétences et s’étendant sur un périmètre élargi, celui de l’aire fonctionnelle.

 Les outils de la stratégie métropolitaine

Au cours des années 2000, plusieurs documents de planification ont été établis à l’échelle de l’ancien Grand Casablanca : Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme (SDAU), Plan de Déplacements Urbains (PDU), Plan de Développement Régional (PDR). Alors que ces documents sont toujours en vigueur, la nouvelle Région Casablanca-Settat prépare une stratégie à son échelle. Deux systèmes de planification cohabitent, mais aucun ne porte sur le territoire métropolitain. Les prochaines évolutions législatives devraient instaurer les documents de planification à l’échelle intercommunale et établir les liens de compatibilité entre ces documents.

Par ailleurs, le développement durable est devenu une composante indispensable de la métropole contemporaine. Il serait donc intéressant d’établir une politique de développement durable, orientant toutes les autres démarches stratégiques, à l’image des Plans Climat en France. Celui du Grand Lyon, définissant un scénario de développement urbain permettant d’atteindre les objectifs d’émissions de CO2, constitue une excellente source d’inspiration.

La métropole, un projet participatif ?

La mise en place d’un projet métropolitain consiste à définir une vision pour l’avenir du territoire. Quel développement souhaite-t-on d’ici dix ou vingt ans ? Bordeaux Métropole, par exemple, veut devenir « une métropole attractive à l’échelle européenne, en s’appuyant sur l’harmonie de ses paysages et de son cadre de vie ». Aujourd’hui, dans leur discours, les autorités marocaines affirment vouloir faire de Casablanca un « hub financier international ». Mais Casablanca ne doit pas oublier ses traits propres, qui fondent son identité : médina traditionnelle, architecture moderne, culture cosmopolite, littoral remarquable…

Les autorités de Casablanca peuvent par ailleurs s’appuyer sur la vision de la société civile. Citons ici la démarche « La Métropole c’est vous » de Grenoble Métropole, consistant à associer la population à travers des forums participatifs, des comités d’usagers et un site internet collaboratif. Il s’agit de la meilleure manière de garantir l’appropriation et la mise en œuvre du projet métropolitain par tous les acteurs du territoire.

 

Pablo Carreras


[1] Organisation de Coopération et de Développement Économiques – http://www.oecd.org/fr/