Initialement aménagés à l’extérieur des bourgs,les cimetières ont depuis été rattrapés par l’extension urbaine, formant des enclaves fermées. Les difficultés liées à cet héritage sont loin d’être anecdotiques : immobilisation de terrains dans des secteurs parfois stratégiques ; détours considérables pour les divers modes de déplacement ; périmètre figé susceptible de gêner l’aménagement ou la rénovation du quartier ; contribution à l’îlot de chaleur urbain et à la pollution des sols.

A l’heure où les objectifs de densification des cœurs de ville se confrontent à un manque généralisé d’espaces publics, les cimetières pourraient-ils être mieux intégrés à la ville, sans perdre leur identité ? Tour d’horizon des initiatives des communes pour diversifier les usages qui y sont associés.


Del51_cim_4s espaces verts à part entière

Après une période de minéralisation poussée des cimetières, des collectivités, partout en France, amorcent le mouvement inverse.
Les raisons sont diverses, de l’arrêt de l’usage des pesticides au moindre coût d’entretien, en passant par la restauration de sols perméables pour la gestion de l’eau, la préservation de la biodiversité, etc. C’est par exemple le cas de Pornichet, Strasbourg ou encore Versailles, qui ont eu recours à des aménagements variés selon la configuration de chaque cimetière : allées enherbées, tombes fleuries à même le sol, espaces libres en prairie… Le tout entretenu de façon soignée, afin d’éviter l’impression d’abandon parfois associée à une végétation abondante.

La Ville de Niort est allée encore plus loin lors de la réalisation de son nouveau cimetière en 2014. Conçu en régie pour être le plus « naturel » possible, il prend l’allure d’un véritable parc. La recherche du plus faible impact environnemental a amené à repenser les méthodes de crémation : les soins de conservation sont réduits au maximum pour limiter la diffusion de polluants dans le sol ; les corps ou cendres sont déposés en pleine terre, au sein de cercueils ou d’urnes biodégradables. Au lieu du coffrage habituel, une simple pierre de calcaire en guise de sépulture, s’intégrant discrètement au paysage. Cette solution présente aussi l’avantage d’être plus économique pour les proches, sans remettre en cause le droit à une sépulture digne.


l51_cim_3Ouverture sur l’extérieur et circulations douces

Les cimetières présentent souvent peu d’accès depuis le reste de la ville, obligeant piétons et cyclistes à les contourner. Des collectivités comme Nantes, Saint-Denis ou Paris travaillent sur les possibilités de traversée de leurs cimetières, par l’aménagement des accès existants ou la création de nouvelles ouvertures. Ces réflexions s’accompagnent généralement d’un projet plus global d’amélioration de la circulation au sein de ces lieux : organisation des allées et des divisions, revêtements de sol, signalétique, mobilier et équipements… C’est aussi l’occasion de mettre en valeur un patrimoine menacé par le manque d’entretien, d’aborder le site sous l’angle paysager (au sein du cimetière, mais aussi vers et depuis l’extérieur), de revoir la qualité des murs ou des clôtures qui l’entourent.

Envisager le déménagement ?

Même si l’adaptation des cimetières existants permet un meilleur dialogue avec leur environnement, leur présence est parfois problématique en soi. C’était le cas de celui de Gennevilliers, en plein cœur de la commune, où il était prévu de constituer un nouveau centre-ville. De plus, enchâssé dans un périmètre très restreint, il ne pouvait pas s’agrandir. La municipalité a donc décidé dès 1947 de déplacer progressivement les sépultures vers un nouveau cimetière en périphérie : une opération qui a pris près de 50 ans à se réaliser !

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Conclusion

Le cimetière reste un objet urbain délicat à bien des égards mais des expériences récentes montrent que des évolutions matérielles et fonctionnelles sont possibles, aussi bien dans l’aménagement des cimetières eux-mêmes que dans leurs relations avec le reste de la ville, voire dans leur organisation à plus grande échelle. Il y a donc un enjeu très fort à intégrer ces équipements dans les stratégies d’urbanisme des communes et à considérer les opportunités qu’ils représentent, au-delà des seules activités d’inhumation.

 

Robin Chalot

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